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Il existe de nombreux derbies à Londres, mais l’un d’entre eux a une saveur particulière : le derby du Nord entre Arsenal et Tottenham. Ce duel historique dépasse le cadre sportif, incarnant une rivalité locale intense qui divise le nord de la capitale.
Fondé en 1882 par des jeunes d’une école locale, Tottenham s’est rapidement enraciné dans le nord de Londres. En 1899, le club s’installe définitivement à White Hart Lane, son stade emblématique, où il jouera pendant plus d’un siècle avant de migrer vers son nouveau stade beaucoup plus moderne, le Tottenham Hotspur Stadium, en 2019.
De son côté, Arsenal voit le jour en 1886, dans le quartier ouvrier de Woolwich, à l’est de Londres. Créé par des ouvriers d’une usine d’armement, le club connaît rapidement des difficultés financières en raison de la précarité du quartier, difficile d’accès et en déclin industriel. En 1910, Henry Norris, un riche homme d’affaires, prend la tête du club. Trois ans plus tard, en 1913, pour sauver Arsenal de la faillite et lui offrir un avenir plus florissant, Henry Norris prend une décision qui va bouleverser la géographie du football londonien : il fait déménager le club à Highbury, dans le nord de Londres, à seulement cinq kilomètres de Tottenham. Ce déménagement marque le début d’une rivalité féroce avec Tottenham. Les supporters et dirigeants des Spurs voient d’un très mauvais œil l’arrivée d’Arsenal sur leur territoire, transformant cette proximité en l’une des rivalités les plus passionnantes du football anglais.
Une rivalité Spurs/Gunners qui s'intensifie après la 1ère Guerre Mondiale
La rivalité entre les deux clubs s’intensifie considérablement durant la saison 1914-1915. À cette époque, Arsenal se classe 5e de la Deuxième Division, tandis que Tottenham occupe la dernière place de la Première Division. Cependant, le début de la Première Guerre mondiale vient mettre un terme aux compétitions de football pendant quatre ans. La reprise du championnat se fait en 1919 mais les autorités de la ligue décident de modifier la compétition en augmentant le nombre d’équipes en passant de 20 à 22. Face à l’absence de règles claires, qui auraient dû être établies en amont concernant la promotion et la relégation, un vote est organisé pour déterminer les clubs qui accéderont à la première division. En conséquence, Chelsea, alors 19e de celle-ci, est maintenu dans l’élite, tandis que les premiers et deuxièmes de l’échelon inférieur sont promus. Pourtant, la surprise vient de la décision de promouvoir également Arsenal, qui se trouve en 5e position de deuxième division, à la place de Tottenham, qui se retrouve condamné à descendre. Cette décision entraîne une montée de tensions et de rancœurs entre les deux clubs. Et c’est ainsi que débute plus d’un siècle de rivalité intense, marquée par des affrontements aussi bien sur le terrain qu’en dehors de celui-ci.
Au printemps 2001, l’avenir de Sol Campbell à Tottenham est en suspens avec seulement trois mois restants sur son contrat. Le capitaine formé au club, et devenu un pilier défensif de l’équipe est considéré comme l’un des meilleurs défenseurs du monde. Lors d’une interview, il affirme même vouloir rester fidèle à son club de cœur, alimentant ainsi les espoirs des supporters des Spurs. Cependant, la surprise est de taille lorsque le défenseur anglais signe un contrat gratuitement avec Arsenal, son grand rival, dans le plus grand des secrets.
Cette décision est perçue comme une véritable trahison par les fans de Tottenham. Lors du retour de Campbell à White Hart Lane en novembre 2001, les supporters des Spurs manifestent leur colère de manière marquante. En effet, à l’arrivée du bus des Gunners, de nombreux fans arborent des tee-shirts et des ballons portant les inscriptions « Judas » et « Levez-vous si vous détestez Campbell ». Un mannequin à l’effigie de l’ancien capitaine est même pendu à un lampadaire sur Tottenham High Road. Ce transfert marque donc le début d’une animosité encore plus profonde entre les deux clubs, consolidant ainsi la rivalité entre Arsenal et Tottenham pour les années à venir.
La saison 2003-2004 restera à jamais gravée dans les mémoires des fans d’Arsenal. Les “Invincibles”, comme on les surnomme, ont accompli l’exploit de terminer la saison sans défaite. Sous la direction d’Arsène Wenger et avec des stars telles que Thierry Henry, Patrick Vieira et Robert Pirès, Arsenal a dominé la Premier League. Cependant, ce qui a donné une dimension encore plus particulière à cette saison pour les supporters des Gunners, c’est le lieu de leur triomphe. Le dernier match a eu lieu contre Tottenham, sur le terrain de leur éternel rival, le White Hart Lane. En concédant un match nul 2-2 (voir les buts), les Spurs ont permis aux Gunners de célébrer leur succès dans leur propre stade.
La tension était exacerbée par la présence de Sol Campbell, dont les provocations ont envenimé l’atmosphère. Sa déclaration après la rencontre, “j’ai toujours rêvé de soulever un trophée sur ce terrain”, n’a fait qu’aggraver la situation. Ce moment de gloire pour Arsenal, célébré sur le terrain de son ennemi, a donc profondément renforcé cette rivalité londonienne