Naples - Vérone : Une rivalité entre football et tensions sociales

Au-delà du terrain, la rivalité entre Naples et Vérone reflète des tensions profondément enracinées dans l’histoire et la société italienne. Ces deux villes, éloignées par leur géographie et leur culture, incarnent deux visions totalement opposées entre le nord et le sud de l’Italie. 

Naples

Deux villes, deux visions opposées de l’Italie

Un Nord riche contre un Sud populaire

Naples et Vérone symbolisent deux réalités opposées en Italie. Naples, symbole du sud méridional, est une ville pleine de vie, connue pour son ambiance chaleureuse et son histoire liée au Vésuve (volcan). Mais cette ville souffre aussi de problèmes économiques et est perçue comme une ville populaire avec un fort taux de chômage ce qui crée un certain mépris de la part du nord de l’Italie.

Au contraire, Vérone, dans le nord, est une ville plus calme et prospère, célèbre pour son patrimoine romain et l’histoire de Roméo et Juliette. Elle représente souvent un nord plus riche et raffiné. Ces différences culturelles et économiques créent une tension entre les deux villes, et cette rivalité se retrouve aussi dans le monde du football et notamment des tribunes. 

Quand les stades de foot deviennent des champs de bataille

Lors des matchs entre le SSC Napoli et Vérone, les supporters des deux équipes n’hésitent pas à se provoquer. La Curva Sud de l’Hellas Vérone est une tribune très politisée à l’extrême droite, le chef ultra du club est d’ailleurs interdit de stade jusqu’en 2030 et est affilié au parti Forza Nuova, un parti d’extrême droite ultra nationaliste et ouvertement néofasciste. Certains chants de Vérone insultent les Napolitains en les caricaturant de pauvres ou de sales. Des banderoles ont plusieurs fois étaient déployées, dont une avec l’inscription : “lavez-vous” et d’autres à connotation beaucoup plus racistes (dialectik football).

En réponse, les supporters de Naples défendent fièrement leur identité et ripostent avec leurs propres slogans. Dès le début des années 80, les premières grosses provocations apparaissent. Dans la Curva B du Napoli, une banderole “Juliette est une prostituée et Roméo un cocu” est mise en place pour se moquer directement de la tragédie shakespearienne qui se déroule à Vérone (SoFoot). Tous ces échanges reflètent donc un conflit plus large, entre une Italie du nord et une Italie du sud qui se comprennent difficilement au vu des différences sociales et économiques flagrantes entre ces deux territoires.

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Le footballeur Dirceu : une figure au cœur de la rivalité

Un symbole du transfert entre deux mondes antagonistes

Dirceu, milieu offensif brésilien des années 1970, est arrivé en Italie après avoir joué lors des Coupes du Monde 1974, 1978 et 1982. Il a d’abord rejoint Vérone en 1982 avant de porter les couleurs du SSC Napoli la saison d’après en 1983. Son passage dans les deux équipes en pleine montée des tensions a fait de lui une figure atypique.

L’impact sur les terrains et les tribunes

Lorsqu’il a rejoint le Napoli, il est devenu un symbole du club du sud, bien que son séjour coïncide avec l’arrivée de Diego Maradona, qui le dirige tout droit vers la sortie. Néanmoins, son transfert entre ces deux mondes antagonistes n’a pas atténué les rivalités. Au contraire, les fans voyaient en lui un « traître », ce qui ajoutait une dimension humaine à une opposition avant tout géopolitique. À son retour à Vérone, les Brigate Gialloblù saluent le milieu de terrain brésilien par la banderole suivante : « Maintenant, tu n’es plus étranger, Naples t’a accueilli dans le continent noir » (SoFoot).

Maradona a lui aussi, un an plus tard, pointé du doigt le racisme des ultras de l’Hellas en disant : « Ils nous ont reçus avec une banderole qui m’a fait comprendre tout de suite que la bataille de Naples n’était pas seulement liée au football : on y lisait, Bienvenue en Italie ». C’était le Nord contre le Sud, les racistes contre les pauvres » (L’Arena).

Cette rivalité entre le club de Diego Maradona et Vérone dépasse donc le simple cadre du sport : elle illustre les fractures sociales, culturelles et politiques qui divisent l’Italie en deux et où le football devient le théâtre d’affrontements entre un nord revendiquant sa supériorité et un sud populaire, fier de son identité mais trop souvent marginalisé.