Derby éternel de Belgrade : entre passion et tensions
L'histoire du derby éternel de Belgrade
Pour comprendre pleinement la passion et l’intensité qui entourent le Derby Éternel de Belgrade, il est essentiel de plonger dans son histoire. Fondés la même année en 1945, l’Étoile Rouge et le Partizan Belgrade ont rapidement émergé comme les rivaux les plus féroces du football serbe. À l’époque de la Yougoslavie, ces deux clubs étaient bien plus que de simples équipes de football ; ils étaient les symboles de différentes idéologies et identités. L’Étoile Rouge était souvent associé à l’identité serbe, tandis que le Partizan, fondé par l’armée yougoslave, était plutôt lié au régime de Tito. Cette rivalité s’est intensifiée au fil des décennies, alimentée par des facteurs politiques, sociaux et culturels.
Au cœur de cette rivalité se trouve le Derby Éternel, un affrontement qui dépasse largement les limites du terrain de football pour devenir un événement ancré dans l’histoire et l’âme de Belgrade.
Le Derby Éternel de Belgrade est bien plus qu’un simple match de football (lire notre compte-rendu de notre weekend à Belgrade). C’est un événement chargé d’histoire, d’émotion et parfois même de danger. Dans une vidéo captivante, le YouTubeur Samos nous emmène dans les coulisses de ce derby légendaire, révélant les aspects fascinants et parfois troublants de cette expérience.
Exploration des racines du hooliganisme : le lien entre la politique et le football
L’une des caractéristiques les plus marquantes de ce derby est son historique de hooliganisme profondément enraciné dans le football serbe. En effet, le derby est régulièrement le théâtre de violences et de troubles, faisant de lui l’un des plus violents d’Europe.
L’atmosphère de ce derby est si unique qu’elle a attiré l’attention du Samos Football Tour. Cet événement est riche en histoires liées au football, aux ultras et aux tribunes, mais il dépasse également les limites du terrain. Contrairement à la plupart des derbies où chaque équipe affiche fièrement ses couleurs, au Derby Éternel, il est recommandé de porter des vêtements neutres, voire sombres, pour éviter les ennuis.
Cette atmosphère particulière est le résultat d’une histoire complexe de hooliganisme en Serbie, qui remonte aux années 1990. Les hooligans ont souvent été utilisés par les autorités serbes et entretenaient des liens étroits avec la politique. Cette relation entre politique et football est plus pertinente que jamais, comme en témoigne le passé d’ultra de l’actuel président, Aleksandar Vucic, qui aurait même été un ancien hooligan.
L’histoire sombre du hooliganisme en Serbie est illustrée de manière poignante par le meurtre tragique de Brice Taton lors d’un match entre Toulouse FC et le Partizan en 2009. Cette tragédie rappelle les dangers et les conséquences de la violence qui peut éclater lors de ces rencontres passionnées.
Ces éléments ajoutent une profondeur supplémentaire au Derby Éternel de Belgrade, soulignant les enjeux sociaux et politiques qui le rendent bien plus qu’un simple match de football.
Visite du stade Partizan de Belgrade : honorer la mémoire et découvrir l'héritage
Une part essentielle de l’expérience du Derby Éternel de Belgrade est la visite des stades emblématiques, à commencer par le Stade Partizan.
Lors de cette visite, l’enthousiasme est palpable. L’atmosphère si spéciale des environs du stade est immédiatement remarquée, avec une ambiance old school accentuée par les fresques murales emblématiques. Selon Nicolas, c’est un endroit chargé d’émotion et de signification, où chaque mur raconte une histoire de passion et de dévouement pour le football.
L’opportunité de visiter le stade est un privilège, Nicolas ne manque pas de le souligner. Devant le stand des Grobari, les ultras du Partizan Belgrade, il est difficile de ne pas ressentir l’importance de cet endroit dans le paysage footballistique serbe. Le stade dégage une atmosphère unique, imprégnée de l’héritage historique du club et de l’intensité de ses supporters.
Cette visite est une véritable immersion dans l’histoire et la passion du football serbe. Malgré l’absence d’un match en direct, il est facile d’imaginer l’électrification du stade lors d’un derby, avec les fumigènes qui illuminent le ciel et le bruit assourdissant des supporters.
La visite du stade du Partizan et le fait de découvrir le virage des Grobari de plus près a aussi été un moment fort de notre exploration du Derby Éternel de Belgrade. Plusieurs voyageurs se sont faits la promesse revenir vivre ce derby du côté du Partizan Stadion la saison prochaine tant ils sont tombés « sous le charme » des Crno Beli.
Arkan, le tigre des balkans : une figure de la violence et de la controverse
L’histoire d’Arkan, surnommé le Tigre des Balkans, est une sombre saga qui a profondément marqué l’histoire de la région. En 1989, Slobodan Milosevic, conscient du potentiel de danger que représentaient les hooligans s’ils se retournaient contre ses politiques, nomme Željko Ražnatović, mieux connu sous le nom d’Arkan, chef des Delije, les ultras de l’Étoile Rouge.
Cette nomination intervient dans un contexte tendu, alors que la Yougoslavie est sur le point de se fragmenter. En mai 1990, lors d’un match à Zagreb entre l’Étoile Rouge et le Dinamo Zagreb, une véritable guérilla éclate dans les tribunes entre les Croates et les 3000 Delije ayant fait le déplacement. Ces événements marquent le début de la guerre des Balkans, déchirant les pays de la région et causant d’innombrables souffrances.
Arkan, profitant du chaos, crée alors les « Tigres d’Arkan », un groupe paramilitaire impliqué dans des actes d’ethnic cleansing, de massacres et d’atrocités. Ces actions ne sont pas uniques à un seul camp, les forces croates étant également impliquées dans des actes similaires.
La guerre des Balkans, qui a ravagé des pays comme la Bosnie et la Slovénie, a coûté la vie à plus de 100 000 personnes et a laissé des cicatrices profondes dans les deux camps. Même si le conflit en Croatie a officiellement pris fin en 1995, les blessures demeurent ouvertes et la mémoire de ces événements tragiques continue de hanter la région.
Enfin, il est intéressant de noter qu’en 2019, le club a installé un char de guerre utilisé pendant la guerre d’indépendance croate comme attraction. Cela a été perçu comme une provocation par les Croates, soulignant les tensions persistantes et les divisions profondes qui persistent dans la région.
Jour de derby : plongée au cœur de l'action
Le jour tant attendu du derby est finalement arrivé, et une excitation indescriptible envahit l’atmosphère. Alors que nous nous approchons lentement mais sûrement de la zone à haut risque, nos cœurs battent de plus en plus fort. Pourquoi tant d’engouement pour le derby éternel de Belgrade ? C’est quelque chose que l’on ne peut véritablement comprendre qu’en le vivant. Ceux qui ont eu cette chance en reviennent toujours avec des souvenirs incroyables, des souvenirs qui transcendent le simple fait d’assister à un match de football.
Le tunnel qui amène sur la pelouse est un endroit mythique chargé d’une atmosphère électrisante. Il est célèbre, connu de tous les supporters. Lorsque les joueurs y pénètrent, c’est comme s’ils entraient dans l’arène des gladiateurs. Le passage est long, sombre, intimidant. On ressent une tension palpable, une concentration extrême. C’est un espace à la fois effrayant et exaltant, où l’on se sent à la fois seul et connecté aux autres. Les applaudissements et chants retentissent juste au-dessus, pouvant clairement créer une peur certaine avant même le coup d’envoi.
Découverte de l'ambiance au cœur du derby éternel
Au moment où l’Étoile Rouge marque, le stade entier gronde avec une explosion de joie et d’enthousiasme qui envahit l’air, déclenchée par le poumon du stade : les « Delije ». Leurs fumigènes et autres pots de fumée illuminent le ciel nocturne, créant un spectacle visuel saisissant.
L’aventure lors de ce derby éternel a été marquée par une anecdote inattendue. Alors que Samos tentait de rejoindre le reste du groupe dans la tribune latérale, il s’est retrouvé par erreur au cœur même de la tribune des ultras.
Il faut avouer qu’il a été surpris qu’on le laisse passer à ce moment-là mais il a continué son chemin. Alors qu’il essayait désespérément de valider leur ticket, rien ne fonctionnait. Face à ce bug, il a opté pour une approche plus traditionnelle, profitant du manque de surveillance. La tribune était pleine à craquer, débordant bien au-delà de sa capacité habituelle.
Malgré les règles strictes interdisant le tournage dans cette zone, Samos a réussi à capturer quelques instants, pour partager au mieux l’atmosphère unique tout en respectant la culture de la tribune et ses codes, sans filmer les visages.
Cette expérience leur a permis de comprendre pleinement cette ferveur incroyable et ce soutien en période de derby.
Le lendemain du derby : le spectacle dévastateur dans les tribunes
Le lendemain du derby, l’image qui se présente est celle d’une tribune dévastée. Une véritable scène de chaos se dessine devant eux. Une partie des sièges a été arrachée, témoignant de la violence de l’affrontement. Des petits feux improvisés ont éclaté, laissant des marques de destruction. La tribune, retournée, est méconnaissable dans son état dévasté.
Ils remarquent un t-shirt des ultras adverses, brûlé dans un geste de provocation. Malgré les tentatives, le feu n’a pris que timidement, mais l’intention est claire.
C’est un spectacle impressionnant, presque surréaliste. Des restes de fumigènes jonchent le sol, témoignant de la passion débordante des supporters. Ils remarquent des seaux de terre disposés devant le virage, prêts à éteindre les fumigènes en cas de besoin.